vendredi 3 novembre 2023

Et si je vendais mon entreprise aux salariés ?

Le savoir-faire, l'implication et la motivation des salariés est un des éléments les plus importants de la pérennité d'une entreprise. Le cédant le sait bien et il doit naturellement s'interroger sur les conditions d'une transmission d'entreprise en interne. 

Dans ce schéma, il n'est pas nécessaire de rechercher des repreneurs extérieurs et cette situation a l'avantage d'une transition en douceur avec la préservation des équipes et de la culture d'entreprise. Comment faire une radiographie et poser un diagnostic sur ce sujet ? Est-ce toujours une bonne solution ?


Les bonnes questions à aborder avec les salariés  
  • Comment évoquer ce sujet, parfois tabou, en confidentialité et en confiance pour avoir leur avis ? Il y a-t-il un ou plusieurs salariés intéressés par la reprise de la société ? Quelles sont leurs interrogations, leurs motivations, leurs attentes ?
  • Peuvent-ils s'entendre et porter un projet de reprise commun ? Quel est celui ou celle en mesure d'en assurer le leadership ? Les salariés sont-ils conscients et prêts à assumer les responsabilités et les contraintes du dirigeant mandataire d'une société ?
  • La reprise en Scop (société coopérative) est-elle possible ? Il y a des solutions de transmission progressive de l'entreprise aux salariés avec des aides financières et un accompagnement complet du cédant et des repreneurs par les spécialistes de l'Union Régionale des Scop. 
  • Les salariés sont-ils capables de mobiliser leur épargne personnelle (avec l'accord de leur conjoint) pour constituer un apport suffisant pour être crédible auprès des banques ? Sont-ils conscients de la portée d'un emprunt bancaire et de l'exigence de résultats et d'une performance d'entreprise dopée pour faire face à la dette d'acquisition ?
  • Quelle est la valorisation de l'entreprise pour les salariés ? Le prix est généralement plus faible que celui demandé aux repreneurs extérieurs à l'entrepise (personnes morales ou personnes physiques) mais dans quelle proportion ?
  • Quel montage financier de l'opération ? Faut-il envisager un crédit vendeur du cédant ? Selon quelles modalités ? Quid de l'immobilier d'entreprise loué à la SCI familiale du dirigeant ? Existe-il des garanties pour le paiement ? 

Devoir moral de réussite et accompagnement du cédant

Attention à ne pas créer un problème, faire naître de faux espoirs ou démotiver les salariés si la cession de l'entreprise n'est pas à leur portée financière, trop compliquée ou trop risquée. Il faut conduire une réflexion sereine, argumentée et dépassionnée avec discrétion et confidentialité. L'objectif est de s'entendre sur toutes les conditions de la réussite de l'opération car la transmission aux salariés n'a pas le droit à l'échec. Quelles solutions si, après la cession, la situation financière de la société ne permet pas de faire face aux engagements et si les loyers immobiliers ne sont pas réglés ? 

La transmission ne doit pas laisser le cédant sur un sentiment d'inachevé ou culpabilité. Le dirigeant a naturellement un devoir moral d'accompagnement plus important dans le schéma de la cession aux salariés. En même temps, il est nécessaire qu'il sache rapidement se détacher de son " bébé " pour faciliter la tâche des repreneurs en interne qui apportent du sang neuf, une nouvelle impulsion et vision à l'entreprise. 

On met tous les sujets sur la table pour appréhender et évacuer tous les " non-dits " des parties intéressées. Une bonne façon de traiter ces questions est de faire appel aux conseils habituels de l'entreprise : l'expert-comptable, l'avocat, le conseil juridique, le notaire, le conseiller patrimonial, l'expert en transmission d'entreprise... On associe étroitement dans ces réflexions le conseiller bancaire ; les banques apportent toujours une expertise pertinente pour analyser la faisabilité de la transmission d'entreprise aux salariés et elles ont une position de juge de paix sur le montage financier.  


La cession d'une entreprise se prépare soigneusement et longtemps à l'avance avec l'aide de professionnels

La réflexion est très riche d'enseignements pour cerner l'ensemble des conditions à réunir pour la cession en interne. Si cela n'est pas le cas, elle va permettre d'acter la nécessité de trouver un repreneur extérieur, soit une entreprise faisant une croissance externe, soit un repreneur personne physique. Les salariés sauront très bien le comprendre et seront rassurés de savoir qu'une démarche sérieuse de recherche de repreneurs est mise en oeuvre pour assurer la pérennité de l'entreprise et des emplois. Il faut rester ouvert sur les schémas ; il peut arriver, au final, qu'une solution de cession à un repreneur extérieur soit trouvée en associant des salariés clés à la reprise. 

Beaucoup de dirigeants méconnaissent les étapes, la complexité et la durée d'une transmission d'entreprise. Ils remettent à plus tard ce sujet délicat qui les interpelle et qui implique souvent une remise en question personnelle. Naturellement optimistes, ils ont l'espoir d'une solution miracle qui se fasse toute seule.

La cession d'une entreprise se prépare longtemps et soigneusement avec l'aide de professionnels. Dans tous les cas, le parcours pour mener à bien la transmission de sa société, avec tous les aléas humains..., est une des aventures professionnelles les plus marquantes et intéressantes pour le dirigeant. 

Jean-Yves Lestrade, FRANCESSION Grand Est 
jylestrade@wanadoo.fr - Tél : 06 08 31 68 86

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